T’es où ?
Il fut un temps, long, et il y a bien … longtemps, où les téléphones n’étaient que fixes. De grands formats et de couleur noire (parfois blanche, plus luxueux), en matière plastique, posés sur une petite table ou accrochés au mur, ils trônaient le plus souvent à l’entrée, dans le couloir, et le fil était relativement court. Pas nécessaire qu’il soit plus long d’ailleurs puisque l’on s’asseyait à leurs côtés.
La sonnerie était bruyante et peu fréquente, car téléphoner coûtait cher alors. Pour économiser, il fallait jongler avec les horaires. La nuit ou en dehors des heures de bureau, les tarifs allaient jusqu’à diminuer de moitié. Téléphoner dans la même région était à la portée de tous, dans la mesure où l’on n’était pas un gros parleur mais appeler au-delà ou à l’étranger, tout le monde ne pouvait pas se le permettre.
Comment aurions-nous pu supposer alors, il y a une quarantaine d’années, qu’un jour nous pourrions communiquer gratuitement, ou presque, avec l’autre bout de la terre, tout en visionnant notre interlocuteur en direct par le biais d’un écran d’ordinateur. Comment imaginer que tout un chacun passerait du temps à discuter, via les ondes, de vive voix ou par écrit, en abrégé dans ce cas, et que ledit message arriverait instantanément. Que même les enfants auraient leur téléphone portable, au cas où … Que les conversations seraient plus ou moins brèves mais fréquentes, et pas forcément intéressantes ou importantes. Que l’on pourrait photographier avec l’appareil en question et même « googler » pour obtenir toutes sortes d’informations.
Que ledit objet, à l’origine professionnel, se voudrait indispensable. Que l’on croiserait les gens dans la rue semblant parler tout seuls, téléphone en poche et oreillette discrète. Que d’autres encore, assis à la même table ou partageant un banc, auraient les yeux rivés sur leur petit écran respectif. Et que les contacts directs feraient place aux communications téléphoniques ou messages SMS avec le célèbre …T.Où ?
Betty
Juin 2018