La Hollande

A la découverte du pays des Moulins - Septembre 2011
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Vendredi 2 septembre : Doubs, Hte-Saône, Hte-Marne, Aube, Seine & Marne, Val d’Oise

Il est 11h30 lorsque nous mettons en route nos moteurs, par un beau ciel bleu et une température estivale. L’autoroute pour commencer, puis la nationale nous conduisant à Pontarlier. Juste avant Troyes, nous reprenons l’autoroute, chargée aux approches de la ville. La chaleur est de plus en plus intense et un petit arrêt café s’impose, à Bonbouillon, sur une terrasse. Nous contournons ensuite la ville de Langres, qui doit valoir la visite, car entourée de fortifications, avec des portes d’entrée très cossues. Ce sera pour une autre fois ! Nouvel arrêt, à Chaumont cette fois, pour nous dégourdir un peu les jambes, le temps d’un café, dans un très beau pub boisé style irlandais où la décoration est chaleureuse, y compris dans les toilettes. Le pâtissier voisin ne fait pas de glaces hélas, c’eût été agréable par cette chaleur. La région est très plate et la route, tranquille, est bordée de champs de maïs et de forêts. A Collombey-les-deux-églises, un mémorial à l’effigie du Général de Gaulle se voit de loin, une croix de lorraine gigantesque domine du haut de la petite colline avec ses 43,5 mètres de haut. Les villages que nous traversons sont déserts, leurs habitants se tiennent sans doute au frais, à l’intérieur de leurs murs. Nous arrivons enfin à Fosses, dans la région parisienne, vers 21 heures, un peu fatigués (600 kms en 9 heures).

Samedi 3 septembre : Val d’Oise, Paris

Il a plu durant la nuit et l’on nous parle d’un bel orage, que nous n’avons pas entendu ! Soleil et chaleur sont déjà au rendez-vous. Nous ferons une arrivée triomphale à Paris, par la Rue de Rivoli, pris dans une circulation intense. Nous dégoulinons sous nos habits et casques par cette chaleur. Heureusement que Pascal s’est muni d’un GPS, nous gagnons ainsi du temps tout en évitant le stress. Nous laissons nos motos dans le parking souterrain de la Place Vendôme, dans lequel nous nous changeons entre les Smart, puis gagnons la caisse de l’Olympia pour y chercher nos billets. Juste à côté, le Café de l’Olympia grouille de monde et propose de délicieuses salades composées. Au sous-sol de l’établissement, des reproductions d’affiches sont peintes à même les murs, représentant quelques artistes de renommée s’étant produits dans ce magnifique théâtre, du joli travail. Le ciel s’obscurcit brusquement, le vent secoue passablement les arbres et la pluie s’abat sur Paris. Nous courons pour rejoindre le théâtre, situé à quelques mètres. Une fois au sec, voir arriver les gens encore plus trempés que nous, qui s’ébrouent, est amusant. Nous voilà maintenant à l’Olympia, une première pour nous, confortablement installés, non loin de la scène, un magnifique rideau de velours rouge devant nos yeux. Eddy Mitchell, dit Schmoll, arrive sur scène à 20h15, accompagné de cinq musiciens. Il finira avec un ensemble de cuivres, soit une douzaine de musiciens, partant dans des mélodies jazz/blues, après avoir égrainé un certain nombre de ses vieilles chansons. Le public, composé de gens de notre génération essentiellement, se montre très enthousiaste. A 22h15, il termine son tour de chant, ne répondant aux applaudissements insistants qu’avec une chanson. Aux rappels suivants, il se contentera d’entrouvrir le rideau, vêtu d’une robe de chambre, ne nous laissant donc aucun espoir. Fidèle à lui-même, il a orchestré son récital et nous ne ressentons pas l’émotion que provoque son pot’ Johnny. Un autre bémol, le son est trop fort et nous ne comprenons pas toujours les paroles. Ce fut quand même un bon moment en ces lieux célèbres. Lorsque nous sortons, sans bousculade, la pluie a cessé, la route est sèche et la chaleur est revenue. Il est 23 heures et nous voilà sur les Champs Elysées, tournant autour de l’Arc de Triomphe. Je fredonne la chanson de Joe Dassin avec émotion. Aucune ligne au sol, c’est la gabegie, chacun se faufile, nous sommes très attentifs, d’autant que le trafic est encore intense en cette fin de soirée.

Dimanche 4 septembre : Oise, Somme, Pas-de-Calais

La pluie est tombée durant la nuit et le ciel en garde encore des traces, il fait donc moins chaud, ce que nous apprécions. Les routes sont tranquilles, les villages fleuris et les forêts nous apportent un peu de fraîcheur. Un arrêt à Compiègne s’impose, lieu chargé de souvenirs. Un mémorial, que nous visitons, retrace l’histoire maudite de la deuxième guerre. Trois bâtiments ont été conservés en leur état brut, qui nous font froid dans le dos et dans lesquels figurent des listes de personnes tuées ou déportées, des témoignages et explications. La pluie nous surprend avant Arras, nous obligeant à enfiler nos habits appropriés. C’est au château de Saulcy, dégoulinants, que nous sonnerons. Le fils de la maison nous ouvre la porte, partant en courant chercher sa mère, qui accepte de nous accueillir et de nous mettre à disposition un peu de place dans son garage pour motos et habits pluie. Le château se trouve dans un hameau, donc pas question de trouver un restaurant. Elle accepte de nous servir un modeste repas dans ce qui doit être leur cuisine. Tandis que Madame s’est éclipsée, son mari vient à deux reprises s’enquérir de notre condition. La pluie ayant cessé, nous pouvons tout à loisir contempler un joli coucher de soleil. Notre chambre est charmante, sobre, avec un mobilier de valeur et sans télévision, pour une fois ! Dans la salle de bains, un chauffage électrique est le bienvenu, pour nous réchauffer et sécher nos vestes. Pas un bruit dans le château, comme si nous étions les seuls clients.

Lundi 5 septembre : Pas-de-Calais, Belgique

Il est 9 heures lorsque nous entrons dans la salle du petit-déjeuner, à côté d’un groupe de hollandais parlant fort. Par la fenêtre, nous admirons le jardin ensoleillé mais encore très mouillé de la nuit. Jus de pomme et confitures de la région, baguette et croissants frais, tout y est pour nous faire passer un bon moment. Un petit tour dans le parc pour s’imprégner des lieux et faire les photos d’usage, brrr, il ne fait que 16°. Nos motos ont dormi au sec, mais sont un peu boueuses. A quelques kilomètres de là, nous entrons dans Arras, ville magnifique aux maisons anciennes très soignées et fleuries. Sur l’une des places, la fête est finie, les forains rangent et démontent, d’énormes camions manoeuvrent, gênés par des voitures mal garées souvent. Quel dommage que ces grandes places pavées soient réservées aux voitures, le décor en serait tellement plus beau sans elles. L’hôtel de ville, abritant l’Office du tourisme entre autres, se trouve dans un magnifique château, détruit en 1944 et reconstruit à l’identique. Dans l’entrée, une voûte en gothique flamboyant attire nos regards, de même que les trois géants, légende de la région du Nord. Montés sur une armature en bois, ils sont confectionnés en plastique et tissu et posés sur un chariot à roulettes. La personne prenant place à l’intérieur pour les déplacer, à l’occasion des fêtes, peut porter jusqu’à 135 kg ! Un vélo hybride à trois roues, couvert, attend les touristes. Nous quittons les lieux dans l’idée de trouver une chambre d’hôtes, à l’extérieur de la ville, mais la pluie nous rattrape, nous obligeant à faire demi-tour. C’est au « Bateau du Ch’ti » que nous rassasierons nos estomacs, dans un cadre marin, laissant ainsi le temps au soleil de faire sa réapparition. Le vent est maintenant très violent, nous devons être vigilants dans les dépassements et les croisements avec les camions. Les champs de maïs nous protègent par moments et les arbres sont, eux aussi, malmenés par le vent, offrant un bel effet visuel. Les troupeaux de vaches, de chevaux et de moutons paissent ici et là. Des éoliennes tournent parfois dans des sens différents, encore une belle image. Les nuages se déplacent très vite et nous arrivons à éviter la pluie. A St-Omer, nous ferons une courte halte sur la place de la mairie, transformée en parking et où nous ne trouvons même pas un banc pour savourer notre petit dessert. La petite ville est construite au pied d’un marais, un canal y a été creusé pour communiquer avec la mer. Le prochain arrêt, obligatoire, sera à Bergues, rendue célèbre par le fameux film « Bienvenue chez les Ch’tis ». Nous déposons d’ailleurs les motos au pied du beffroi trônant entre deux places. Le clocher est des plus originaux et laisse apparaître les cloches qui ne sont abritées que par un petit toit. Le lion des Flandres trône au sommet. Nous arrivons hélas 5 minutes avant la fermeture du beffroi et la dame n’a pas envie de faire des heures sup ! Dommage, nous aurions fait un peu d’exercice : 193 marches. De beaux nuages blancs enveloppent le beffroi, s’en éloignant aussi vite qu’ils sont venus. Sur la place, une grande et belle fromagerie présente un beau choix de fromages et de nombreux autres produits de qualité. Nous goûtons aux yaourts « maison », qui ressemblent davantage à des flans. Bergues, petite ville de caractère, est entourée de fortifications.
Tiens, il semblerait que ce fut une frontière ! Etrange, et sinistre à la fois, la bâtisse est fermée – merci l’Europe – et l’endroit désertique. Seul le panneau des limitations nous indique que nous changeons de pays (50, 90 et 120), ce qu’il nous faudra retenir, car il n’y a pas de panneaux aux entrées des agglomérations. Et voilà la mer, youpi, le ciel est gris, la plage déserte et le vent plutôt froid. Quelques sportifs s’adonnent au vol à voile sur la mer démontée. Le sable fin se soulève, attention les yeux. Quant aux hôtels ou B & B, rien en vue, aucun panneau, c’est pourtant une ville touristique. Finalement, voilà un petit hôtel timide, dans une ancienne maison en bordure de route au milieu de laquelle passe le tram, à Westende-Middelkerke. La porte est fermée, sur laquelle est affiché un numéro de téléphone. Le propriétaire arrive sur son vélo pour nous montrer la chambre donnant côté jardin. La pièce sent la fumée, mais nous n’avons pas le choix, sinon celui d’ouvrir les fenêtres. Les motos dormiront dans le jardin, devant la porte. Nous partons à pied à la recherche d’un restaurant, mais tout est désespérément fermé, les commerces comme les appartements, c’est désolant. Apparemment, c’est une ville côtière pour vacanciers, car il y a partout des panneaux : à louer ou à vendre (To huur...). Enfin, voilà un restaurant, ne faisons pas les difficiles, car il est déjà tard. Les moules et le gratin de poissons seront de notre goût.

Mardi 6 septembre : Belgique / Hollande

Il fait gris et venteux lorsque nous ouvrons un œil. Oostende est une ville portuaire avec de magnifiques et gigantesques voiliers. L’autoroute nous conduit ensuite jusqu’à Bruges, appelée « La Venise du Nord », qui n’a rien à envier à sa collègue italienne. Nombreux sont les canaux et très anciennes les maisons, certaines datant du 13ème siècle. Sur la Place du Marché, un imposant beffroi trône fièrement, sa tour n’a que ... 366 marches et son carillon une très jolie sonorité. Des bus à deux étages et des calèches attendent les touristes. Dans une ruelle voisine, une brasserie se vante d’une offre de ...760 bières. Il pleut, nous achetons un parapluie pour poursuivre notre visite et, comme tous les touristes, nous prenons place sur l’une des nombreuses barques, le canal est long de 14 kilomètres au total, mais nous nous contenterons d’un tour de ville afin d’admirer vieilles bâtisses, églises, musées et ponts, ces derniers au nombre de 43, que le guide nous montre du doigt, avec explications en français et en anglais. Il attire notre attention sur une maison à vendre, du 18ème siècle, au prix de 2'300'000 Euros. L’eau est obscure, mais ne sent pas mauvais, contrairement à Venise. Les pontons de location des bateaux sont très fleuris. Des canards et cygnes se sont octroyé un parc. Certains ponts sont très bas et le guide nous conseille de baisser la tête, ça vaut mieux. Nous sommes surpris par le nombre de magasins, en tous genres et de qualité, sans enseignes tape à l’œil, la plupart ne faisant pas partie de chaînes connues, il semblerait qu’il y ait respect. Au petit Maxime, charmant restaurant à l’intérieur chaleureux, l’accueil l’est aussi et les lasagnes sont délicieuses. Lorsque nous nous enquérons auprès du patron pour une chambre d’hôtes, il s’empresse d’appeler sa belle-mère qui en propose une depuis peu. La dame en question est très sympathique, mariée à un parisien, et la chambre, bien qu’étriquée, est moderne et colorée, sans télévision ! Son mari va jusqu’à sortir sa voiture, neuve, du garage pour laisser la place à nos motos, il y en a qui ont le sens de l’hospitalité, non ? Affrontant la pluie, nous retournons dans la ville, équipés de nos K-Way et de notre nouveau parapluie. Sur la place du Marché, les terrasses sont désertes bien sûr, nous en trouvons une cependant, abritée et chauffée, nous permettant d’admirer les lieux, et sourions à la vue des pauvres passants dont les parapluies se retournent avec le vent et qui, finalement, les déposent dans les poubelles, la nature a toujours le dessus ! Il pleut, il pleut, il pleut, les pavés sont luisants, heureusement que nous sommes à pied. Les pauvres chevaux attendent, ils préfèreraient sûrement rentrer à la maison, mais les cochers en ont décidé autrement. La nuit sera tranquille, dans l’espoir d’un ciel plus clément le lendemain.

Mercredi 7 septembre

Nous filons au « Pain quotidien » pour le petit-déjeuner faisant partie de la chambre, choix de notre hôte. Nous retrouvons le style de celui de Genève et prenons place d’emblée à la grande table d’hôtes (prévue pour seize personnes) en bois très cossu. Jus d’orange pressé, pains, croissants, diverses confitures au chocolat, ce à quoi nous rajoutons un œuf et une salade de fruits frais, nous voilà calés pour un moment ! Vers midi, nous quittons la ville, un vent violent nous pousse de côté. Sur les conseils de notre hôte, nous nous arrêtons à Sluis, premier village après la frontière hollandaise, très touristique, ressemblant à Disney World avec ses nombreuses boutiques et ses restaurants. Les maisons sont en brique. A l’entrée de la rue principale, un moulin de remparts mérite d’être visité. Détruit en 1944, il a été reconstruit en 1951. Il s’agit là d’un moulin à balustrade, à calotte tournante, ce qui signifie que la partie supérieure, avec les ailes, peut être tournée manuellement en fonction de la direction du vent. Les escaliers sont raides et étroits pour accéder à la balustrade. Au rez-de-chaussée, une caféteria et des boutiques attirent les badauds. Le ciel se fait menaçant, il est temps de poursuivre notre route. Les hollandais conduisent lentement et se décalent facilement sur la droite pour nous laisser passer dans les bouchons. La pluie commence à tomber lorsque nous arrivons à Middelburg. Sur la place du Marché, étals et bancs se mettent en place pour le lendemain. L’hôtel de ville est magnifique, reconstruit en 1940 après avoir été détruit lui aussi. La pluie n’effraie pas les cyclistes, perchés sur de grands vélos anglais. Ils sont nombreux d’ailleurs, d’où le peu de circulation automobile. Il est temps de partir à la recherche de l’Office du tourisme. Après maintes démarches à l’aide du plan et des demandes, nous finirons par y arriver ... trois minutes avant la fermeture. Au deuxième appel téléphonique, une chambre nous attend, mais le propriétaire demande un peu de temps pour la préparer. Sa maison date de 1585, sise en bordure de rue, face au canal. Notre hôte n’a qu’une seule et unique chambre à proposer. Pas de garage, nos motos dormiront sur le trottoir, sous la pluie. Wim est le prénom de notre hôte, très accueillant, qui nous fait faire le tour du propriétaire. La chambre, au deuxième étage, est d’accès difficile par un escalier en colimaçon très étroit, pas question de monter avec deux sacoches à la fois. Des plantes vertes, un bouquet de roses sur la table, bouilloire et thés à disposition, un petit lit pour enfant, dans une alcôve, une cheminée et l’accès à la petite terrasse par le biais d’un escabeau, tel est le tableau de la pièce. La végétation extérieure, composée d’arbres magnifiques, de plantes grimpantes et de fleurs, est luxuriante. De plus, nous avons la jouissance de la bibliothèque, pièce voisine donnant sur le canal, avec cheminée également. Quant au petit-déjeuner, nous choisissons de nous le faire servir dans la cuisine d’époque, en sous-sol, à l’accès encore plus rude, mais dont nous sommes tombés sous le charme. Wim prend note de tous nos désirs sur une feuille, la liste des propositions est complète. C’est le luxe, pour 75 €, un rêve.

Jeudi 8 septembre

Il a beaucoup plu durant la nuit et la journée ne s’annonce pas meilleure. Nous décidons donc de la consacrer à la visite de Middelburg et de passer une nouvelle nuit dans ce paradis. recit-hollande1793.jpegUne belle surprise nous attend, dans l’ancienne cuisine visitée la veille et réservée aux clients, un petit-déjeuner exceptionnel, varié et soigné : œufs brouillés au jambon, gardés au chaud sur un vieux réchaud à bougies, gouda (bien sûr), jus d’orange fraîchement pressé, pain, toasts et croissants, confitures « maison », fromage blanc battu à la vanille et, pour couronner le tout, une assiette de fruits frais, délicieusement arrangée et colorée, le tout en musique avec Chopin. Notre hôte nous propose ensuite une nouvelle visite guidée de sa vieille maison, des combles à la cave, on se croirait dans un musée. Prêts à affronter la pluie, grâce à nos K-Way que nous allons ainsi aérer, nous commençons par un tour de marché, à pied. Les hollandais ne craignent pas le mauvais temps, eux, le marché est très animé et s’étale sur toute la journée. Un orgue de Barbarie, installé sur une remorque équipée d’un petit moteur et d’un guidon de moto, pour le déplacer, égrène des notes de musique çà et là. Notre marche nous conduit au bord du canal où nous prenons place sur une barque, dirigée par un guide parlant un peu d’allemand et quelques mots de français. Attention, baissez la tête ! Certains ponts sont en effet très très bas et il ne ferait pas bon tomber dans l’eau très obscure du canal. De retour dans la ville, à la recherche d’un petit troquet sympa, nous découvrons une brasserie, bien cachée au fond d’une ruelle, qui nous séduit par son décor boisé, sa décoration raffinée, son escalier en colimaçon, en métal façonné, et dans laquelle nous dégustons un excellent strudel aux pommes, servi avec une crème battue. Pluie, pas pluie, pluie, ... nous nous décidons à louer des vélos pour longer le canal dentelé entourant la ville, traversant d’abord un merveilleux parc (interdit aux vélos !) très verdoyant, nous arrêtant près d’un moulin, puis nous faufilant dans des rues et ruelles, l’une réputée comme la plus petite et l’autre comme la plus ancienne de la ville. Partout où nous allons, nous constatons le peu de circulation et l’absence de stress. Notre hôte nous a indiqué une laverie, tenue par des handicapés, nous leur laissons notre linge sale et venons rechercher le propre deux heures plus tard, genre de service que nous apprécions en vacances. Les loueurs de vélos font apparemment partie d’une association sociale, eux aussi. A 16h30, l’église ferme ses portes, trop tard pour la visite. Certains magasins ferment déjà à 17h30. Il semble qu’il y ait des magasins de chaussures à chaque coin de rue, ce qui me permet de trouver enfin une paire de bottes pour la moto, de belle qualité mais au même prix que chez nous.

Vendredi 9 septembre

Une semaine s’est écoulée depuis notre départ de Clarens. Wim, notre hôte, nous a confectionné un nouveau petit-déjeuner de son cru, dans la même cuisine, avec une plus grande assiette de fruits et un ananas frais, creusé et empli de ce savoureux fruit exotique. Nous passons encore un beau moment, en compagnie de Chopin, coutume à laquelle tient Wim, dont les notes de musique parviennent jusqu’à nous. Le ciel est gris et, malgré la petite bruine, nous décidons de partir, à regret cependant. A Vlessingen, nous atteignons le bord de la mer, grise et agitée, avec un vent froid. Un chat blanc se montre très câlin avec tous les passants. Une mouette s’approche des motos et ne semble nullement effrayée par notre présence. L’endroit est désert, on se croirait en Angleterre. Nous apercevons de gros bateaux marchands à proximité de la plage, qui est en partie goudronnée. Un peu plus loin, à Westkapelle, nous grimpons sur la digue, construite à sept mètres au-dessus de la mer, aménagée pour les piétons et cyclistes. Un char d’assaut y est exposé, arrivé d’Angleterre le 1er novembre 1944. Toutes les vitres du restaurant, au pied de la dune, sont recouvertes de photos noir/blanc, gardant cependant la transparence. La bruine s’est maintenant estompée, le ciel s’éclaircit et le soleil fait son apparition, nous réchauffant un peu. Nous traversons un bras de mer sur trois ponts mis bout à bout, d’une longueur totale de cinq kilomètres. Pascal est intrigué par leur système de panneaux mobiles verticaux, tout le long des ponts, mis en place pour amortir la violence des tempêtes. Au loin, des éoliennes dansent, gracieuses. Grâce au guide vert, nous nous arrêterons au château Kastell Westhove, abritant l’auberge de jeunesse, entouré d’eau et de forêts. Un très vieux tilleul, planté entre 1000 et 1400, trône devant le château, son tronc est fendu, mais ses quelques branches feuillues laissent à penser qu’il est encore en vie. La jolie ville de Zierikzee est très animée, entièrement pavée, et toutes ses maisons sont en brique. Le clocher de l’église, très spécial, fait penser à DisneyWorld. On y voit beaucoup de vélos bien sûr, des calèches, et très peu de voitures. Un port offre l’hospitalité à de vieux voiliers en bois. Un petit pont se lève, s’ouvrant par le milieu, pour laisser passer les bateaux. Un nouveau Solex est exposé, ... électriqu,e appelé « e-Solex ». L’autoroute, au trafic d’abord fluide, se charge aux approches de Rotterdam, avec quelques motos, rares jusque-là. Juste après Rotterdam, que nous avons évité, un joli canal minuscule longe la route, les habitants accèdant à leurs maisons par des ponts privés. On aperçoit des serres à perte de vue. En fin d’après-midi, nous arrivons à Scheveningen sans avoir trouvé de chambre d’hôtes et nous devons nous résoudre à loger à l’hôtel, dont la chambre donne de l’autre côté de la mer. Nous nous baladons le long de la plage, sur une promenade d’environ un kilomètre, aménagée et animée par toutes sortes de restaurants offrant une cuisine du monde entier pour, finalement, en choisir un construit directement sur la plage, où nous dégustons des moules. Le vent souffle fort, mais la terrasse est protégée par des parois en verre. De grosses torches sont allumées, ne résistant pas toujours au vent.

Samedi 10 septembre

Un petit-déjeuner dans un hôtel est très anonyme, les clients ne se parlent pas et le buffet est quelconque. Par contre, nous jouissons de la vue sur la mer. En fin de matinée, nous quittons l’hôtel pour repartir à l’assaut d’un B & B, sans succès à nouveau, c’est le week-end et tout est complet. C’est donc le retour à la case départ et, cette fois, l’hôtel Aquarius nous propose une chambre avec vue sur la mer, guère plus chère, et plus grande. Le soleil, bien que timide, nous invite à nous rendre à la plage avec les maillots de bain. L’eau est froide, je me contente de me tremper jusqu’aux genoux tandis que Pascal, partant du principe que nous sommes au bord de la mer ( !), se trempe entièrement, nageant très rapidement pour se réchauffer. Des cerfs-volants s’éloignent des mains de leurs propriétaires, les cordes sont très longues, ce qui doit nécessiter de la force. Des chercheurs de pièces de monnaie sillonnent la plage avec un détecteur. recit-hollande2030.jpeg
Nous partons ensuite à l’assaut du seul loueur de vélos, situé à l’opposé, en marchant d’un bon pas, et décidons de garder les deux-roues jusqu’au lendemain. Sur la plage, une dizaine de femmes prennent des cours de tam-tam avec un africain et à côté, des jeunes s’adonnent au volley. Sur la promenade, nous croisons un couple de jeunes mariés noirs, tous deux habillés en blanc (coquille d’œuf), suivi de quelques invités. Aucun esprit festif ne transparaît sur leurs visages et dans leur comportement, ils auraient plutôt tendance à pousser des têtes ...d’enterrement.

Dimanche 11 septembre

Nous enfourchons nos vélos pour nous rendre à La Haye et visiter Madurodam, la Hollande miniature, avec de temps en temps des apparitions du soleil. C’est un lieu magnifique, conçu et réalisé avec goût et exactitude, où l’on reste plus de deux heures à admirer les répliques des bâtiments connus, enveloppés de verdure et d’eau. Nombreux sont les bonzaïs et fréquents les canaux dans lesquels se prélassent de gros poissons. Les maquettes de train et l’aéroport sont entourés de massifs de fleurs colorés. Il y a même une salle de concert, avec écran et musique. Pour un Euro, on reçoit, tombant dans un wagon, une paire de petits sabots en porcelaine de Delft et, à la sortie, on nous propose la photo touristique, s’agissant d’une plaquette avec une grande photo et trois petites ainsi qu’un porte-clefs avec la photo intégrée, pour 7,50 Euros. De là, nous partons pour le « Louwman Museum », musée national de l’automobile abritant la collection privée de l’homme du même nom, composée de 230 véhicules de tous âges, de toutes nationalités, très rares pour la plupart, avec quelques rares motos, le tout sur trois étages, dans de très jolies mises en scène. A la fin de la visite, quelle n’est pas notre surprise de nous retrouver dans une ruelle reconstituée, pavée, avec des répliques de vieux magasins, un garage et, au milieu de tout cela, une terrasse pour rester un moment de plus dans cette ambiance rétro.
recit-hollande_1936.jpegOn se croirait en Angleterre, au musée de Beaulieu ou au Victoria Hall. Nous allons poursuivre cette journée, déjà bien remplie, par la visite du musée Escher, hélas un peu à la va-vite, car il ne reste que 45 minutes avant la fermeture et le lendemain est jour de fermeture hebdomadaire. Le musée est installé dans un ancien palace du 19ème siècle, ces vieux murs lui conviennent parfaitement. Sur la façade, noircie par le temps, un balcon façonné, doré, clinquant, et, au-dessus, un agrandissement d’une œuvre de l’artiste, en noir blanc. Par des escaliers très étroits, nous accédons aux deux étages supérieurs. Dans chaque pièce, de beaux parquets et des cheminées, chaque fois différentes, et aux plafonds, des lustres très spéciaux, en cristal, représentant divers objets (violon, nuage, tête de mort, mappemonde, etc, au nombre de 19 !). Quant aux œuvres de l’artiste, elles ont été réalisées au fusain selon la technique du trompe-l’œil et de la perspective, du bel art. En sortant, nous découvrons un grand parc ombragé dans lequel a pris place une brocante et, un peu plus loin, une exposition de sculptures venant de Chine. Trois d’entre elles sont magnifiques, de grande envergure, la plus originale représentant un géant, en métal bouchonné, à quatre pattes, d’une hauteur d’environ cinq mètres. Nous continuons à pédaler jusqu’à Binnenhof. Le Parlement est installé dans un magnifique bâtiment ancien, d’une belle architecture, au bord d’un étang. Au milieu de la pièce d’eau, une petite île avec des arbres, où les oiseaux sont en paix, et un jet d’eau. Derrière cette bâtisse ancienne, l’on aperçoit des immeubles contrastant par leur modernité, tous différents et très originaux. Au centre ville, une maison colorée appelée « The Sting » abrite un grand magasin sur deux étages et, à côté, une galerie marchande propose de beaux magasins et d’énormes lustres, répliques d’ancien, dans le passage. Nous prenons place dans un restaurant « branché », plutôt rétro, au premier étage, avec, au mur, une photo des célèbres crowners américains. Nous regagnons ensuite notre hôtel en traversant une forêt, sur des chemins réservés aux piétons et cyclistes. Ce fut une journée très sportive et culturelle à la fois. A 20h15, il fait encore jour, le vent souffle fort et nous jouissons d’un beau coucher de soleil.

Lundi 12 septembre

Sur le grand mur de la salle à manger, une peinture, faite à même le mur, représente une rue de la Nouvelle-Orléans, très animée et colorée. La serveuse m’informe que le peintre y a intégré les propriétaires de l’hôtel. Avec une petite bruine et un grand vent, nous allons restituer les vélos à leur propriétaire, revenant à pied le long de la mer par la promenade. Vers 11 heures, nous quittons l’hôtel pour nous rendre au Musée Mesdag. A l’accueil, l’homme nous propose de ranger nos casques dans un grand coffre en bois, qu’il referme soigneusement. La première partie du musée présente les tableaux de Mesdag, peintre du 19ème siècle, pour la plupart de grands formats. recit-hollande1978.jpegPuis, empruntant un passage étroit et sombre, nous arrivons sur une plate-forme, tel un kiosque en bois, le souffle coupé par ce que nous voyons, ne sachant tout d’abord pas où nous sommes. Tout autour, un paysage à 360°, d’une circonférence de 120 mètres, sur une hauteur de 14 mètres et, à nos pieds, une dune de sable. Cette œuvre gigantesque a été réalisée par Monsieur Mesdag en 1880, avec l’assistance de sa femme, de son fils et d’un couple d’amis, le tout en ... quatre mois ! Incroyable, difficile d’imaginer qu’il ait pu réaliser ce chef d’œuvre avec les moyens de l’époque en un laps de temps aussi court. Il a représenté sur cette toile tout ce qu’il voyait du haut de la dune, la mer et les bateaux, la plage, le village, les hommes et les chevaux. Son œuvre, revenue à sa famille, a enduré le temps et a nécessité, à la fin du 20ème siècle, pas moins de ... dix ans de restauration. Elle est maintenant protégée au maximum de la lumière et de la chaleur. Au rez-de-chaussée, une vidéo nous donne, en français, tous les détails de l’œuvre et de sa restauration. Il nous est difficile de nous extirper de ce lieu magique et nous le quittons à regret, les yeux tout « ébouriffés », après une deuxième visite. Il y a des lieux magiques que j’ai beaucoup de peine à quitter.
Pas facile de sortir de La Haye, même le GPS est perdu ! Nous passons près des buildings modernes, aperçus au loin précédemment. Un vent très fort nous handicape, nous chassant de côté. A Delft, nous ferons une halte pour admirer la ville de la porcelaine, ses maisons en brique, son hôtel de ville majestueux et ses canaux. Nous laissons les motos à ras le canal, aïe ! La pluie se met à tomber, le vent est de plus en plus violent, nous nous enfilons dans un petit restaurant sympa, rétro, pour y manger une salade. Les piétons tiennent à grand peine leurs parapluies et les cyclistes font de gros efforts pour avancer. En sortant du restaurant, nous découvrons un café installé dans un ancien poids public de 1770. Des énormes portes, des murs en briques, une très grande balance en métal, datant de 1647, plaquée contre l’un des murs, des poutres gigantesques, un sol en vieilles briques et une ancienne pendule, l’ambiance est des plus rétro. Un bonbon à la menthe accompagne notre boisson, à l’abri dans son emballage, portant le nom de la maison Fortuin, créée en 1842. Sur la place pavée, les boutiques se côtoient avec les articles en porcelaine de toutes sortes, aux dessins bleus sur fond blanc. J’y trouve de jolis bracelets auprès d’une vendeuse qui parle très bien français et nous dit que la Suisse est chère. Au moment de quitter la ville, le beau temps est revenu, le ciel bleu et le soleil nous accompagnent. Par contre, le vent est de plus en plus violent. Nous empruntons un moment l’autoroute pour nous rendre à Leiden. C’est terrible, il faut se cramponner au guidon et regarder droit devant soi. Le trafic est intense aux approches de la ville, où le vent semble encore redoubler d’intensité. En passant sur les ponts, des bourrasques nous déséquilibrent, les cyclistes ont de la peine à avancer. Pascal se fait peur le premier avec un coup de vent terrible le poussant à droite, à l’arrêt, puis à gauche lorsque la voiture située à sa droite le dépasse, laissant s’engouffrer le vent. A mon tour, alors qu’il a décidé de tourner à gauche sur un passage piéton pour s’arrêter à l’abri d’un bâtiment, je suis figée de peur de tomber si je bifurque à gauche. Je le vois arriver en courant pour m’aider et cela me donne la force de tourner. Ouf, nous voilà en sécurité et sur nos pieds. Les hollandais ne semblent pas affolés, eux, même à vélos. Nous partons maintenant à la recherche d’un B & B. Près de la gare, des parkings à vélos sont bondés, sur deux étages. Leiden est une ville universitaire et les jeunes y sont donc nombreux, ce qui explique les quelque 5000 vélos à la gare ! La fille de l’Office du tourisme a probablement envie de fermer boutique, il est près de 18 heures et elle nous envoie chercher les adresses dans un Cyber Café, c’est la première fois que ça nous arrive. Le troisième appel est le bon. Residence 102 est le nom du B & B, tenu par un couple de motards, au bord du canal. L’accueil y est sympathique et la chambre très soignée. La maison date du 19ème siècle et a été restaurée il y a moins d’une année. Un escalier très étroit nous conduit au deuxième étage. Nous partageons la salle de bains avec les pensionnaires de la chambre voisine, mais chacun de nous a son lavabo et sa douche. Nos motos dorment dehors, devant la maison, mais heureusement, dans la soirée, le vent se calme. Nous longeons le canal pour nous imprégner des lieux et trouver un restaurant. Les ponts sont nombreux et rapprochés. L’un d’eux est beaucoup plus large que les autres, équipé d’un éclairage et agrémenté de colonnes, on en déduit qu’il doit être utilisé pour les marchés. De chaque côté des ponts, l’accès y est pentu, je me demande comment font les vélos en hiver. Le clocher de l’église est illuminé, sa pendule est bien visible grâce à des points lumineux et un joli carillon nous interpelle. Les petits magasins sont nombreux et les grands magasins, s’il y en a, sont bien cachés. Dans une vieille maison étroite, non loin de notre B & B, nous sommes fort bien accueillis. Un tout petit restaurant, portant le nom de « de dames proeverij », est tenu par une dame très souriante et son amie, aux fourneaux. Des bougies sur chaque table, il est soigné, tout comme les plats qu’elles nous proposent. Les plateaux « dégustation » en bois sont ronds et tournants avec quatre petits bols garnis de mets différents. Nous choisissons la version « poisson » et la « végétarienne » afin de goûter aux deux. L’ambiance y est feutrée malgré les tables rapprochées. La personne voisine, nous entendant parler français, s’adresse à nous, elle a vécu à Thonon et fait ses études à Genève ! Il fait presque froid lorsque nous regagnons notre chambre et la lune est pleine. Nous sommes frappés par la quiétude des lieux.

Mardi 13 septembre

Le ciel bleu et quelques nuages composent le décor matinal. Le petit-déjeuner est servi dans la cuisine familiale, nous sommes en compagnie de deux dames allemandes, mère et fille, voyageant par les transports publics. La propriétaire est absente mais les deux jeunes américains, très sympathiques, rencontrés la veille, se tiennent à notre disposition. Ils ont décidé de voyager durant une année, à vélos, et s’arrêtent partout où on les demande, via un site Internet. Moyennant quelques travaux, ils sont nourris et logés gratuitement. Nous nous rendons à pied à la gare, Amsterdam étant notre but du jour. Sa gare est magnifique et démesurément grande, datant du 19ème siècle. Suivant le guide vert, nous allons boire le café au restaurant « 1st Klas », très ancien. Un perroquet blanc a élu domicile sur le comptoir. Installé sur un support en bois, il n’est pas attaché. L’endroit est très fréquenté et bruyant. Des gens y viennent pour travailler malgré le bruit. Au sortir de la gare, nous nous dirigeons vers le canal pour prendre place dans un bateau « Canal Bus 24 Hours ». Libre à nous de nous arrêter où bon nous semble (20 emplacements différents) et d’en reprendre un autre ultérieurement. Nous faisons notre première halte au Marché aux fleurs flottant, le plus grand marché aux fleurs du monde. Les nombreux stands sont effectivement sur l’eau et se côtoient, proposant fleurs et bulbes de toutes sortes, avec la possibilité d’envoyer dans le monde entier. Attirés par un fou rire, nous entrons dans un magasin plein de gadgets, dont ce singe en peluche qui se roule par terre en hurlant de rire. Il est bien évident que c’est contagieux, ce qui n’est pas le cas de tous les promeneurs que j’observe. Certains se retournent, surpris, certains rient, d’autres restent sérieux, la situation est cocasse. Puis, nous nous devons de goûter au Pannekoeken (crêpe) dans un « Real Oldfashioned Dutch Pancakes », encore un joli bistrot étriqué et sympathique où nous nous installons en vitrine, avec, sous nos yeux, les vendeurs de fleurs. Nous reprenons ensuite le bateau pour nous arrêter devant la maison d’Anne Franck qui, malheureusement, est déjà fermée. Les vélos, très nombreux, sont stationnés sur les ponts, dans les rues, sur les places, il y en a partout. A Amsterdam, ce ne sont pas moins de 600'000 vélos et 1281 ponts. Il y a même le Pont bleu, inspiré du Pont Alexandre III à Paris. Des péniches, à quai, avec des jardinets fleuris, servent d’habitations. Selon le guide, il y aurait ainsi 2'500 habitations sur l’eau. Du bateau-mouche, nous pouvons tout à loisir admirer les maisons très anciennes et les arbres (220'000 dans toute la ville). Une péniche d’une quarantaine de mètres de long tourne à angle droit dans un canal étroit, après que le pont se soit dressé pour la laisser passer. Les canaux, au nombre de 165, datent des 16ème et 17ème siècles. Dans l’une des nombreuses rues piétonnes, on trouve même un magasin proposant des produits d’hygiène et, au fond, des toilettes très propres, parfumées et décorées de posters, musique à l’appui. Les trams articulés ont cinq voitures avec soufflets. Rares sont les maisons modernes ou alors bien intégrées. Les rues et ruelles sont bondées. Dans une église désaffectée, nous sommes surpris de trouver un café que nous ne pouvons admirer que de l’extérieur, car c’est l’heure de la fermeture. De magnifiques réverbères anciens, devant une église, sont très imposants. Le vent souffle toujours, chassant les nuages. Nous traversons le quartier de China Town, très animé. Sur une grande place, un artiste de rue retient le monde. A l’extérieur de la façade du Musée de cire portant le nom de « Madame Tussaud », deux très grands personnages dominent, d’une hauteur de trois à quatre mètres, représentant D’Artagnan et un homme en jean’s. Mais il y a aussi des Sex Shop, un Sex Museum et des Coffee Shop, d’où sortent les odeurs et fumées.
Les cyclistes font leur SMS en pédalant, grillent les feux rouges ou circulent sur les places, se frayant un chemin parmi la foule. Ils roulent très vite, même sur les pavés mouillés. Une dame, sur son vélo, tient une valise à la main. Certains vélos sont équipés de sièges pour enfants, parfois un devant et un derrière, parfois deux derrière, d’autres encore avec une caisse devant ou une remorque derrière. Quelquefois, des filles prennent place derrière, assises en amazone. Les femmes les décorent souvent de fleurs. Nous ne sentons pas d’agressivité en ville ni de méfiance. Les femmes, de tous âges, sont nombreuses à circuler à vélos, le soir. Nous quittons Amsterdam par le train de 19h30, fatigués par cette longue marche et le bruit de la ville, et sans avoir vu les dames en vitrine !! De retour à Leiden, nous allons manger une moussaka dans un restaurant grec, avec musique et vue sur le canal.

Mercredi 14 septembre

Nous prenons congé de notre hôte et des jeunes américains, toujours aussi souriants. Notre premier arrêt du jour sera à Kinderdijk, en pleine campagne, pour y admirer dix-neuf moulins, dont trois seulement tournent et l’un d’eux se visite. recit-hollande2142.jpegA l’intérieur de ce dernier, des scénettes de la vie d’antan avec des mannequins nous renvoient quelques décennies en arrière. L’endroit est paisible. Nous faisons la navette avec un bateau pour nous imprégner des lieux. Le vent souffle, et c’est une fois de plus le ballet des nuages. Non loin de là, dans un grand bâtiment, au milieu de l’ancienne machinerie des pompes alimentées par des turbines à vapeur, un documentaire vidéo nous explique les polders et la régulation du niveau de l’eau, sur plusieurs écrans, sous-titré en français. Dans le village, chaque maison a une enseigne, probablement lumineuse la nuit ou au moment des fêtes, représentant les contours d’un moulin. Avant d’arriver à Utrecht, nous trouvons un B & B dans une ferme. Il s’agit cette fois d’un appartement en duplex, avec cuisine équipée et chambre à l’étage. Tout est neuf et de belle qualité. La salle de bains est équipée de deux lavabos ronds en pierre posés sur de beaux panneaux en bois. Devant les fenêtres, nous jouissons d’un joli paysage campagnard avec un canal, des saules, un champ et une jolie petite terrasse sur un sol en gravier, dont nous ne pouvons guère profiter, vu le froid. Les motos dorment dans un hangar, à côté d’un petit veau, né de la veille. La ferme est magnifique, agrémentée d’énormes hortensias de chaque côté. De là, nous nous rendons à Gouda, le temple du fromage. Des guirlandes sont tendues en travers de la rue principale, auxquelles sont suspendus des fromages en couleurs. Nous entrons dans une fromagerie où s’étale un choix de gouda, certains en couleurs (herbes, épices) et des souvenirs. Dans une chocolaterie, quelle n’est pas notre surprise de choisir des chocolats ... belges ! Sur une jolie place pavée de forme triangulaire, un hôtel de ville cossu trône, avec un carillon musical et une scénette colorée sur l’une des façades. Des personnages attendent, de chaque côté d’une porte à deux battants, la sortie du roi. A chaque heure, passée de 5 mn (par respect pour un autre carillon), le roi sort avec un serviteur et tous se mettent en mouvement au son du carillon, la mise en scène dure quelques minutes. Puis, nous embarquons à deux reprises sur des bacs pour de très courtes distances – environ une minute – à 1,90 Euro, traversant la rivière Lek. En fin d’après-midi, nous nous rendons à Breukelen (devenue Brooklyn aux USA grâce à un hollandais). En bordure de route, j’aperçois une petite chèvre sautant prestement sur le dos d’un poney, dans un enclos, la scène est cocasse. La ville semble importante, un magnifique magasin de fleurs propose des bouquets des plus originaux. En face, une dame nous interpelle en français, à l’entrée d’un pub-restaurant, nous vantant les qualités de la cuisine des lieux. Nous questionnant pour connaître notre provenance, elle nous dit connaître la clinique La Prairie, se trouvant à 500 mètres de chez nous ! Le pub est bruyant. Des escaliers conduisent au restaurant, où nous prenons place, seuls clients. L’accueil est sympathique, la décoration soignée, de même que les très belles salades fantaisies et le dessert. A la nuit tombante, nous nous baladons dans la ville, passant sur un pont-levis, d’où nous contemplons des oies blanches et brunes sur le canal. Des canards volent au-dessus de nos têtes. De retour au B & B, l’odeur de la campagne nous rappelle que nous sommes bien dans une ferme. Le pauvre petit veau est épouvanté, il essaie de se hisser sur ses pattes, à grand-peine.

Jeudi 15 septembre

Pas un nuage dans le ciel et, oh surprise, le vent est tombé. Nous jouissons de cet environnement verdoyant et du calme de la campagne. La propriétaire nous a déposé, comme convenu, une jolie caisse en bois dans le hall d’entrée, très discrètement, dans laquelle nous découvrons un petit-déjeuner appétissant avec jambon, fromage, pains et croissants, œufs durs, yoghourts « maison », jus d’orange pressé, fraises, de quoi se sustenter et tenir aisément jusqu’au soir. Le premier but de la journée consiste en la visite du château de Haar, à quelques kilomètres de là. Nous longeons d’abord le joli canal, la route est peu fréquentée. Une maison attire notre attention au passage avec, dans son jardin, un château miniature et une pièce d’eau, l’endroit est bucolique. Nous prenons des tickets pour la visite du parc seulement. Le château est entouré d’une pièce d’eau, ce qui le met particulièrement en valeur. Il s’agit du plus grand château des Pays-Bas, datant de 1892. Ses murs sont en brique rouge et les fenêtres sont pourvues de volets rouges et blancs. Le bâtiment principal est relié à un grand « châtelet » par un pont couvert, sorte de galerie. Un énorme et très vieux marronnier trône en face du château, entouré d’un muret, et l’on peut rester en sa compagnie sur un banc en pierre pour admirer la lumière du soleil qui passe à travers son feuillage très touffu et encore verdoyant. Devant le château, un joli puits est surmonté d’un chapeau en fer forgé travaillé, noir et or, et un peu plus loin, un petit canal s’enfonce dans la forêt, une rangée d’arbres lui faisant la haie d’honneur, l’eau est toute tranquille, c’est un lieu très romantique. De l’autre côté du château, des jardiniers s’affairent dans les jardins à la française. Nous voilà maintenant à Utrecht, encore une très jolie ville que nous avions visitée très rapidement au printemps. Le long des quais, magasins, boutiques, restaurants et cafés se succèdent, créant l’animation. Remarquant un joli gilet pour Pascal, exposé devant une vitrine, le vendeur sort immédiatement avec le même en main, nous vantant la marchandise et nous incitant à entrer. Selon ses dires, il s’agit d’une ancienne boucherie, il y a une magnifique cheminée d’époque et la marchandise proposée est de belle qualité. Il est drôle et nous plaisantons avec lui. Un peu plus loin, nous nous décidons à faire un tour en bateau-mouche, fermé et vitré. Une dame est aux commandes tandis qu’une autre fonctionne comme guide, assurant la traduction en anglais. Nous passons tour à tour le long des terrasses puis des caves et des parcs avec de magnifiques platanes. En fin d’après-midi, nos estomacs se réveillent et nous portons notre choix sur un restaurant thaïlandais, au bord du canal, il y fait un peu frais. Nous voyons ainsi défiler les bateaux mais aussi les cygnes en groupe, connaissant les bonnes adresses. Un gros chat noir et blanc se contente de passer près de nous sans réclamer. Les plats choisis sont particulièrement beaux et copieux, tout en étant légers, et nous nous régalons. J’ai repéré dans le guide vert un Musée de l’épicerie, hélas nous y arrivons trop tard, dommage. Bien caché dans une impasse, il n’est pas facile à trouver et le peu qu’on en voit derrière la vitre nous donne une idée de ce que l’on a manqué ! Il est maintenant temps de rentrer, avant la nuit. Le ciel est rose, quel plaisir. Cette fois, il n’y a plus d’odeur à la ferme.

Vendredi 16 septembre : Hollande, Belgique, Luxembourg

Un petit-déjeuner, semblable à celui d’hier, nous est livré, avec quelques variantes. Ce matin, nous découvrons qu’un autre petit veau est né durant la nuit, il tient à peine sur ses pattes lui aussi tandis que le premier s’est un peu enhardi. Il fait beau et le vent s’est remis à souffler. Dans le champ, devant nos fenêtres, les vaches peuvent enfin sortir de leur étable, ce qui n’était pas le cas hier, elles sont toutes folles, gambadent et jouent pendant un bon moment, c’est un plaisir de les voir ainsi heureuses. Nous quittons les lieux, l’estomac bien plein, et empruntons maintenant l’autoroute à cinq voies en direction d’Utrecht. La circulation est fluide. A l’entrée de la ville, des bâtiments modernes très originaux attirent notre attention. L’un en verre, avec une façade comme enfoncée, porte le nom d’Oracle. Au sommet, une machine servant sans doute à nettoyer les vitres, se voit de loin. Un autre, en verre également, mais avec une armature métallique, est en forme de baleine. Il s’agit d’un garage de luxe. De chaque côté, une paroi anti-bruit est construite de la même façon, avec les mêmes matériaux et va en diminuant de grandeur. recit-hollande2329.jpegD’autres parois anti-bruit sont spéciales, l’une faite avec un amalgame de tuyaux et l’autre avec les dessins des canards d’Escher. Puis, ce seront quelque 150 kilomètres d’autoroute, sans trop de circulation, pour aller jusqu’à Maastricht, à l’entrée de laquelle nous sommes pris dans un bouchon. Heureusement, les hollandais sont sympas et se rangent de côté pour nous laisser passer entre les deux files. Le temps est gris et menaçant et quelques gouttes nous surprennent au centre de la ville. Nous avons juste le temps de sauter dans la calèche pour la visite de la ville. Une dame tient les rennes et un accompagnant est venu prendre place à nos côtés pour faire la traduction dans un anglais difficile à comprendre. Ainsi, nous apprenons que Maas = Meuse (le fleuve), qu’il reste des fortifications datant de 1230 et que c’est une ville universitaire avec pas moins de 40'000 étudiants. De nombreux bâtiments anciens ont été récupérés pour les universitaires. De retour sur la place, nous entrons dans un très vieux bistrot appelé « In den auden Vogelstruys » (A la bonne autruche) datant de 1730. Les clients se sont tous installés sur la terrasse, alors que nous préférons rester à l’intérieur pour en admirer les détails, d’autant que la température n’est pas très élevée. Dans l’une des rues piétonnes, très fréquentée, nous découvrons (grâce au guide vert) une église désaffectée, métamorphosée en librairie, belle idée, car c’est un lieu chaleureux. Un petit tour jusqu’à la Meuse nous permet d’admirer les péniches, la largeur du fleuve et un bateau restaurant attendant les clients. Sur une autre place, belle et très grande elle aussi, c’est jour de marché. Devant l’Hôtel de ville, la statue d’un religieux y trône, surélevée, dominant les lieux, il tient à la main un flambeau duquel jaillit une flamme, c’est une image étonnante et inhabituelle.
Laissant Maastricht derrière nous, nous passons la frontière Hollande/Belgique sans la voir. Ce sera de même pour celle entre la Belgique et le Luxembourg, c’est étonnant et décevant aussi, merci l’Europe. En Belgique, ce seront collines et forêts, avec des routes vallonnées comme dans le Cantal, style grand 8. L’autoroute est peu fréquentée et nous constatons que les belges et les hollandais roulent plus vite ici que chez eux. La voie de droite est réservée aux poids lourds, ça évite les accordéons. La route est mouillée sur les côtés, il semble qu’il y ait eu un bel orage. Le temps passe, la nuit approche et le ciel se fait menaçant, nous décidons donc de faire halte au Luxembourg, à Weiswampach, dans un hôtel très quelconque, bon marché, en bordure de route. Plutôt que de rester dans ce cadre tristounet, nous choisissons d’aller manger dans le restaurant d’en face, et à raison, car accueil, qualité et originalité, tout est réuni. Nos voisins de table sont, d’un côté, une famille de belges engageant rapidement la conversation et, de l’autre, un monsieur luxembourgeois, ravi que nous soyons là pour rompre sa solitude. Nous découvrirons, après coup, le premier étage où nous aurions pu manger au calme et dans les vieux murs en pierre.

Samedi 17 septembre : Luxembourg, Meuse, Moselle, Meurthe-et-Moselle

Le ciel est gris et nous quittons les lieux sans la pluie. Par contre, le vent souffle par rafales. Nous côtoyons le canal de la Moselle où de grosses péniches se prélassent, admirant les vignes tout autour, dont les vendanges sont commencées, puis longeons la frontière allemande, proche de Trier. Pour éviter Metz, nous prenons un bout d’autoroute, gratuite et peu fréquentée. Nous sommes dans une région minière et industrielle, peu attrayante. Nous avons évité la pluie, tombée avant notre arrivée, quelle chance. C’est avec le soleil que nous arrivons à Lunéville, nous nous attablons en terrasse, face au magnifique château, que nous aurons l’opportunité de découvrir gratuitement puisque ce sont les journées du patrimoine. Des artisans s’y sont installés, un graveur sur cristal, une brodeuse, etc. La chapelle a été transformée en salle de concert. Je participe à un concours pour 5 Euros : une robe est exposée, dont il faut estimer la valeur, les fonds sont destinés à l’entretien du château. Les jardins sont immenses, avec des pièces d’eau, des parterres de fleurs très colorés et des arbres en bordure, formant des haies de hauteurs différentes. Puis, nous traversons le Bas-Rhin et le Haut-Rhin, ce dernier avec ses vignobles et ses jolis villages fleuris. Un samedi soir, il est tard et grand temps de chercher une chambre. Chatenois est une jolie petite ville, avec ses maisons à colombage et ses décorations florales, notamment aux fenêtres de la Mairie. Le premier hôtel sera le bon ! Selon la patronne, nous sommes chanceux, car tout est complet, à cause d’une fête dans le village voisin. C’est une maison familiale datant de 1705, simple, mais très jolie avec, en décoration, des nounours sur les fenêtres du café, des poupées et des anges au restaurant. Aux fenêtres, les rideaux sont en papier découpé, représentant des scènes alsaciennes. Nous sommes d’autant plus gâtés qu’on nous autorise à entrer nos motos dans la cour d’en face, fermée. La cuisine est simple mais excellente. Le restaurant est plein, de même que la salle du café où nous sommes. Nous goûterons aux spécialités locales, une tartiflette au Munster et, en dessert, un mini Kouglof glacé avec raisins au rhum, le tout accompagné d’un verre de Gewürztraminer, pas assez doux à mon goût. Une balade digestive pour visiter la petite ville avec ses restes de fortifications, sa tour datant de 1240, son jardin médiéval, financé par la ville et créé par une association d’handicapés, avec des plantes servant notamment à la coloration des tissus, autrefois fabriqués ici (chanvre et lin). Au milieu du jardin, un puits a été transformé en fontaine, l’eau coule d’un gros robinet avec un ancien système de pompage.

Dimanche 18 septembre : Meurthe-et-Moselle / Jura / Suisse

Un buffet nous attend, très sympathique. Un setter anglais tourne dans la cour où nous avons laissé les motos, grimpant sur le mur pour voir ce qui se passe dans la rue. Le ciel est menaçant et nous nous empressons de reprendre la route pour fuir les gros nuages noirs. Ce n’est pas le jour de faire un col et le tunnel reliant St-Dié à Sélestat est bien appréciable. Long de 7 kilomètres, il est limité à 70 kms/h et une distance de 100 mètres est à respecter entre les véhicules. Il faut jongler avec les routes pour éviter la pluie, mon GPS humain est doué pour ça. Nous faisons un petit arrêt à Kaysersberg, village vigneron tellement joli, que nous avons visité il y a quelques années au moment des fêtes de Noël. Nous nous contenterons d’y boire un café et d’acheter des chocolats en forme d’œufs de cigogne et de kougloff. Dans le Jura, nous retrouverons ciel bleu et chaleur et cela jusqu’à Montreux.

Montreux : 2'800 kms en 17 jours.

Clarens, le 29 janvier 2012 Betty