Frottage de mains


Adolescente, tandis que j’attendais nerveusement les résultats d’un examen, je me revois encore me frottant les mains durant un long moment, tentant de réduire ainsi, inconsciemment, l’état de stress dans lequel je me trouvais. Plus tard, je me souviens m’être un jour frotté les mains de façon énergique et enjouée tandis que j’apprenais l’arrivée prochaine d’un livre commandé de longue date. Je l’avais tant désiré, imaginé, attendu. Le toucher, le humer, l’admirer était devenu une obsession, un désir profond. L’hiver dernier, partie précipitamment de la maison pour être à l’heure à un rendez-vous, j’en avais oublié mes gants. Même si le thermomètre n’était pas au plus bas, j’ai dû, à plusieurs reprises, me frotter vigoureusement les mains pour les réchauffer un peu ou du moins leur éviter une douleur désagréable, un engourdissement, voire des engelures. J’ai connu une copine qui, en hiver, avait pour habitude de sortir son tube de crème, à n’importe quel moment, dans n’importe quel lieu, et de se frotter les mains durant un laps de temps qui me paraissait long, plus long que nature. Instant de plaisir, contenance ou geste automatique ? Je n’ai jamais su.
mainsDe tout temps, plusieurs fois par jour et comme beaucoup, je me frotte les mains avec du savon, à la maison ou ailleurs, pour éliminer les impuretés, salissures et autres souillures, geste inculqué dès l’enfance. Habitude ou automatisme ? Plaisir ou nécessité ?
Depuis l’arrivée du mal-aimé, partout où je me trouve, mon regard se pose sur des mains qui se frottent, dans la rue, à la sortie d’un magasin, dans une voiture ou même sur un banc, tout en discutant. Les soignants ont été les précurseurs. Les autorités nous ont conseillés ce geste indispensable. Nous avons fini par l’adopter, par crainte, respect des règles ou habitude.
Est-ce devenu un tic ou… un toc ?

Betty Morel
14.05.2020