Sur la route des 66 😊

Habituellement, j’aime m’amuser en écrivant à mes ami(e)s à l’occasion de leur anniversaire, leur demandant d’inverser les chiffres pour les ramener dans le passé ou les projeter dans l’avenir. Libre à eux de se souvenir ou d’imaginer. Aujourd’hui, je serais bien en peine de jouer avec mes deux chiffres jumeaux.
route66_0564.jpegEt oui, me voilà sur la route 66, rendue célèbre par une marque de motos américaines bien connue (pas de pub !). Ceci m’amène à vous parler de moi puisqu’on le sait « charité bien ordonnée commence par soi-même », sous mon statut de motarde. Certains me connaissent sous cette casquette – enfin, plutôt sous ce casque – d’autres seront surpris de l’apprendre.
J’avais 30 ans pile lorsque j’ai fait l’acquisition de ma première moto, une 125 cm3. Nul besoin de cours, j’ai pu l’enfourcher directement, enfin presque, car une bonne âme charitable m’a enseigné le b.a-ba du deux-roues. Frein avant au guidon, de même que l’embrayage, voilà qui nécessite une petite adaptation, sans oublier la notion d’équilibre. Au pied, le frein arrière et le changement de vitesses ont multiplié les difficultés. Je dois vous avouer que la première fois, je ne suis pas allée très loin ! Bien que basse et légère, la différence avec la conduite automobile était de taille. J’étais l’une des rares femmes à piloter dans la région et, de plus, sans casque puisqu’il n’était pas encore obligatoire. Le samedi matin, je me rendais, cheveux au vent, chez mon coiffeur qui se donnait de la peine et s’arrachait presque les siens en me voyant repartir à moto.
Deux ans plus tard, j’ai sauté le pas pour une cylindrée supérieure. Ce fut un choix difficile parmi toutes les marques. J’avais fait la connaissance du vendeur de Laverda et c’est ainsi que j’ai opté pour une 500 cm3. Son look me plaisait, elle était différente, et européenne de surcroît. Top là, l’affaire s’est conclue ... sans même l’avoir essayée ! Je vous entends rire, je devine votre sourire, votre mine étonnée, oui y’a de quoi. Mais attendez, ça n’est pas fini. Lorsque je suis venue la chercher, le vendeur, et néanmoins propriétaire du garage, a encaissé la totalité de la somme, payée au comptant, sans rabais, en me confiant les clefs. Sous-entendu, débrouille-toi ! Poids et hauteur supérieurs, position différente, je n’étais pas très fière et me revois démarrer, empruntant la petite rue adjacente d’abord, sans dépasser probablement les 10 km/h, pour finalement me lancer – façon de parler – courageusement dans la ville afin de rentrer au plus vite à la maison, le cœur battant d’émotion, tant par ma nouvelle acquisition que par la méconnaissance du véhicule. Il me fallait maintenant me préparer pour le permis, version pratique uniquement, car, détenant le permis de voiture, la théorie n’était pas exigée. Ce furent donc des ronds et des huit, ainsi que des freinages, avec lesquels je devais me familiariser. Sur les parkings des grands magasins, c’était l’idéal en dehors des heures d’ouverture, les surfaces étant planes. Il y a 34 ans, il nous était demandé d’accomplir des ronds et des huit avec un bras levé. Cela devait dater de l’époque où les clignotants n’existaient pas ! Bon entraînement cependant pour l’équilibre. Je n’ai pas compté le nombre d’heures passées à tourner et à freiner, sans tomber. Et c’est ainsi que j’ai réussi. On m’avait parlé du TCS, je me suis donc rendue à Cossonay pour suivre un cours pour débutants. Et voilà, un virus bien inoculé, celui de la moto, que je n’ai pas pu (voulu) soigner. S’en est suivie la rencontre avec un motard qui allait dès lors partager ma vie. Passionné lui-même et, de surcroît, collectionneur de motos anciennes, j’ai attrapé un nouveau virus et me suis adaptée, avec grand plaisir, à nombre de ces vieilles machines de marques, d’années et de styles différents : Norton 500 (GB), Nimbus 750 (DK), Moto Guzzi 500 (I), AJS 350 (GB) et un tricycle 250 Monet-Goyon (F) des années 1928 à 1976, avec commandes inversées pour les anglaises, vitesses au réservoir pour les plus anciennes. Voilà comment perfectionner conduite et réflexes. Nous participions à des sorties ou rallyes, au Danemark notamment, et avons organisé nous-mêmes des Tours de Suisse d’une semaine.
Mes seuls critères de choix ont été, et le sont encore, des marques européennes et une hauteur de selle me permettant de poser les pieds par terre, car rouler est une chose, mais manœuvrer demande à être à l’aise. J’admire ceux/celles qui, à l’arrêt, se trouvent sur la pointe des pieds ... Combien de fois ai-je entendu des dames me demander « si je n’avais pas peur » 😊.
Après mon italienne, que j’ai précieusement conservé et qui attend sa nouvelle heure de sortie, j’ai choisi une anglaise de cylindrée supérieure, avec un kick : un mythe. Puis ce fut une allemande, une voyageuse, équipée de sacoches.
Pour ce qui est des voyages, tout a commencé en 1982 en compagnie de ma Laverda, de Pascal bien sûr et de trois autres copains, destination L'Algérie. Pays désertique, chaleur, tempête de sable, camping, repas lyophilisés et pastilles pour l’eau à boire. Nous nous douchions au moyen d’un jerrican de dix litres, à deux, shampoing inclus ! C’est là que nous avons pris conscience de la valeur de l’eau. S’ensuivirent les pays de l’Est (Hongrie, Roumanie, Tchécoslovaquie, Pologne, Allemagne de l'Est) et là, ce fut le déclic quant au bien-être et à la liberté que nous avions chez nous, car c’était avant la chute du mur de Berlin. Puis le Maroc, le Portugal, l’Angleterre, l’Ecosse, l’Ile de Man, l’Irlande, la Hollande,  la Corse, la Slovénie, la Croatie, la Turquie et les pays limitrophes font partie de nos autres destinations, sans oublier l’Inde où nous avons accompli des performances, au guidon d'Indian Enfield 350 cm. Il s’agissait de rouler à gauche, avec des commandes inversées, le tout dans une circulation sans règles, si ce n’est la priorité au plus gros. En résumé, ce sont donc 33 ans de vacances à moto avec, cependant, une entorse : une semaine sur un canal en Bourgogne, avec le chien, les seules vacances que nous lui avons offertes !
Voilà la rétrospective de mon parcours de motarde : 34 ans au guidon de mes motos, avec mon compagnon. A chaque fois que nous partons sur nos deux-roues, que ce soit pour une journée ou les vacances, c’est le plaisir assuré. Dès les premiers kilomètres, je pousse un soupir de satisfaction, de bien-être.
Ce que représente la moto pour moi, l’évasion, l’indépendance, le plaisir de conduire, le contact avec la nature, le partage et l’amitié, la découverte, les loisirs et l’amour pour ces œuvres d’art métalliques.

Betty
26.04.2015